Archives mensuelles : mai 2015

Asimov

Comme adolescent, j’étais plutôt solitaire. Je passais la majorité de mes vacances à la Vallée, dans notre petit appartement à côté de l’Orbe, et je montais le col de la Givrine en vélomoteur. J’en profitais pour m’acheter une cartouche de cigarettes détaxées à la Cure (à 17 Frs à l’époque), cela me faisait les vacances. Je passais mon temps entre la pêche et la lecture frénétique de tout ce qui me tombait sous la main.

C’est à cette époque là que je suis devenu fan de science-fiction. J’avais vu un Temps-X qui présentait le dernier opus des Fondation d’Isaac Asimov, et j’ai dévoré en quelques jours toute la saga. Il y aurait beaucoup de choses à dire là-dessus, mais ce n’est pas mon propos d’aujourd’hui. Car en effet, après avoir engloutit toute le cycle en question, je suis naturellement allé chez Porchet (le seul magasin du  Sentier faisant librairie – tabac – article de pêche) commander d’autres ouvrages de cet auteur et (après une bonne semaine de délai de livraison) j’ai attaqué le cycle des robots d’Asimov.

Quelques 30 ans plus tard, finalement pas grand chose n’a changé. Je suis plutôt un homme solitaire, et je passe la majorité de mon temps en Thaïlande, sur mon île tropicale, dans ma petite maison dans mon village de pêcheurs. J’y viens en avion, bus et bateau (c’est un peu difficile en vélomoteur), et je m’achète toujours une bouteille de bon whisky au dutyfree (à 59 Frs), même si elle ne fait pas toute la durée de mon séjour. Je passe la moitié de mon temps entre la plongée et la lecture frénétique de tout ce qui me passe sous la main.

A ce propos, je n’ai plus besoin d’aller chez Porchet (j’ai bien peur qu’il soit mort, le pauvre), car j’ai dorénavant une liseuse électronique Kindle. J’ai mis plus de deux ans à m’habituer à ce fichu engin; ce n’est pas un livre. Cela ne sent pas le papier, on ne peut pas corner les pages, et ce n’est pas un « objet physique » avec lequel on a une relation comme l’on a avec un livre relié en papier. Mais il faut reconnaître que c’est plutôt pratique en déplacement : on peut y stocker plusieurs centaines d’ouvrages en télécharger de nouveaux instantanément, et tout est à disposition dans quelques centimètres carrés d’électronique. En plus la batterie dure des mois, ce qui la rend au final presque comparable à un livre.

Quelques jours avant de partir, je suis tombé sur un site web qui contenait l’intégrale du cycle des Robots d’Asimov, en format « epub » pour Kindle. Je l’ai évidemment téléchargé et suis instantanément retombé dans un plaisir solitaire vieux de 30 ans : la lecture. Je me suis (re)dévoré le cycle des Robots en quelques jours, et y ai vu une nouvelle perspective depuis mon grand écart entre l’Europe et l’Asie. J’ai l’impression que ce visionnaire d’Asimov préssentait l’évolution de la société occidentale et l’a transposée dans l’univers des Spaciens, alors que la grouillante société Terrienne est plus ou moins ce que l’on vit ici en Asie… Quoi qu’il en soit, cela m’a donné une nouvelle perspective sur cet oeuvre, et j’ai hâte de me replonger dans le monde de Fondation pour voir si j’y trouve une nouvelle interprétation 30 ans plus tard…

Democracy Monument

Bon… on expliquera une autre fois pourquoi je n’ai rien écrit depuis une année. Ou pas, à voir. Bref, quoi qu’il en soit, me revoici à Bangkok.

Bangkok… Cela fait maintenant plus d’une quinzaine que j’y suis venu pour la première fois. Je n’y ai pas noté de changements majeurs, si ce n’est que le trafic est sans doute encore pire qu’avant, mais que maintenant la partie est de ville est très bien desservie par le réseau de métro et le fameux « Skytrain ». Le skytrain est absolument génial : efficace, bon marché, il dessert même l’aéroport principal et le relie au très animé quartier de Sukumvit, là où se trouvent les fameux complexes commerciaux, les grands hôtels et les bars louches où les filles jouent au ping-pong.
Je n’ai jamais été très friand de ce coin de la ville, je préfère largement la zone de Banglampu, plus à l’ouest dans un des méandres de la rivière Chao Praya. Cette zone jouxte la fameuse Khao San Road, véritable Mecque des routards autrefois. Il faut bien préciser « autrefois », car Khao San s’est apparemment fortement assagie : beaucoup moins de vendeurs à la sauvette, plus de films projetés dans les bars, et beaucoup moins de touristes avinés faisant du scandale dans la rue. Cela est sans doute dû au durcissement de la loi, et ma foi c’est plutôt un mal pour un bien, la zone commence à prendre un côté presque familial.
Le seul problème, c’est que cette zone n’est pas desservie par le skytrain. Les seuls moyens de déplacement sont les taxis, tuk-tuks, ou alors le service de transport public par bus. Pour moi qui cumule maintenant les tares de chômeur longue durée sans prestations, orphelin, sans domicile fixe et pendulaire longue distance, je suis un peu contraint de me tourner vers ce mode de transport.

Ceci dit, les bus marchent très bien; ils ne sont pas chers, climatisés, et le réseau est très dense. C’est donc un moyen très pratique pour rayonner depuis Banglampu vers les autres quartiers de la ville. Le seul bémol, c’est qu’il faut annoncer au receveur lorsque l’on monte à bord son arrêt de destination. Et c’est là que tout se complique.

Un bon repère pour le début de la zone Khao San – Banglampu est le fameux « Democracy Monument » :

democracy_monument

Il est situé sur la grande artère de Ratchadamnoen, et est difficile à rater. Idéal donc comme arrêt de bus. Le problème, c’est qu’en langue thaïe, son nom n’a absolument rien à voir. Et dans le bus le receveur ainsi que les passagers sont rarement des universitaires en goguette, et c’est rare que quelqu’un parle autre chose que le thaï. Donc on a beau eu apprendre le nom de son arrêt par coeur, « Democracy Monument », personne ne comprend. Le nom de la rue, « Ratchadamnoen », j’ai renoncé depuis longtemps à essayer de le prononcer. Si on tente de mimer le monument avec ses doigts, on fait assez rapidement des gestes obscènes, et cette dernière méthode est donc à proscrire. Non, la seule méthode est d’apprendre son nom par coeur, en phonétique, et se le répéter en boucle durant toute la journée :

อนุสาวรีย์ประชาธิปไตย

Cela se prononce « pratchatipathai ». Le seul truc mémotechnique approximatif que j’ai trouvé c’est « Pas de chats, pas de pad thai »… Ce n’est pas exact mais cela a tout de même marché !

PS : Si vous voulez briller en société, annoncez que vous adorez le réalisateur vainqueur de la palme d’or 2010, Chapi chapo va raser ta couille Apichatpong Weerasethakul .